Clémentine est infirmière au Bénin. Arrivée en mission début mars, elle nous raconte le quotidien de sa mission dans un pays pour lequel la pandémie semble encore un peu loin… (témoignage recueilli le 28 mars)
« Voilà maintenant presqu’un mois que j’ai commencé ma mission au Bénin. J’interviens comme infirmière dans un dispensaire à une dizaine de kilomètres d’une ville moyenne (il est isolé car il s’agit d’une ancienne léproserie). Ces trois premières semaines ont été l’occasion de découvrir le fonctionnement du dispensaire. Je me suis investie dans les soins en consultation, aux enfants malnutris puis aux enfants hospitalisés.
Quand j’ai quitté la France, le coronavirus n’avait pas pris tant d’ampleur dans notre pays. On entendait parler des premiers cas mais on ne s’inquiétait pas plus que ça. À mon arrivée, j’ai rejoint directement mon lieu de mission. Rapidement, le coronavirus a été au centre des discussions à table avec Lucie, volontaire comme moi, et les cinq pères de la communauté dont un est français. Nous évoquons la situation en Italie, en France mais très peu celle du Bénin.
Lucie et moi sommes en contact avec la France : nous prenons conscience que ce qui s’y passe est inédit. Avec l’annonce du confinement, nous vivons par procuration, grâce à nos familles, la situation française, même s’il est difficile d’imaginer le climat qui y règne. Nous sommes à des années lumières de ce qui se vit en France. Pas de confinement, le premier cas a été annoncé il y a une semaine le jeudi 19 mars et aujourd’hui seules 6 personnes sont touchées dans le pays, selon les chiffres officiels.
Au lendemain de l’annonce du premier cas, il nous a été demandé à nous, soignants, de porter des masques et de nous laver les mains régulièrement. En ce qui me concerne, connaissant la situation française, je m’y applique méticuleusement mais ce n’est pas le cas de la plupart des soignants béninois qui portent souvent leur masque autour de leur cou. Depuis lundi, des points d’eau ont été installés au dispensaire afin que les patients puissent se laver les mains en arrivant.
Le gouvernement a mis en place le confinement des grandes villes du sud à partir du lundi 30 mars. Depuis le week-end dernier, il n’y a plus de messe dans la paroisse. Les Béninois n’ont pas l’air de réaliser ce qui se joue en ce moment sur le globe. Ils réalisent petit à petit en voyant les chiffres des décès en Italie mais cela ne les convainc pas de porter leur masque, malgré quelques exceptions. Certains me posent des questions concernant la situation en France et le virus lui-même, son mode de transmission, sa gravité… Beaucoup de fausses informations circulent et il est difficile pour eux de démêler le vrai du faux.
Je pense qu’en tant qu’européenne ayant une vision extérieure, j’ai un rôle à jouer dans la prévention grâce l’éducation aux gestes barrières, mais aussi en portant une attention particulière à la circulation de fausses informations qui pourraient être responsables de la propagation du virus. Certains pensent par exemple que le virus ne peut survivre en zone chaude donc qu’ils sont à l’abri… Prévenir et éduquer pour éviter que la situation ne devienne celle de l’Europe. Je ne prétends pas changer le monde mais apporter ma pierre à l’édifice. »
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