Marine est étudiante en école d’ingénieur (à l’ENSAM). En mission pendant un an en Côte d’Ivoire, elle a enseigné la physique-chimie au sein du groupe scolaire Madeleine Daniélou à Abidjan. Accueillie par les Sœurs de la Communauté Saint François-Xavier, elle a partagé leur quotidien tout au long de sa mission, ce qui l’a confortée dans sa foi.
La situation de l’éducation en Côte d’Ivoire
En Côte d’Ivoire, le secteur de l’éducation est confronté à d’importants défis, en particulier en ce qui concerne la scolarisation des jeunes filles. J’ai rapidement constaté que le taux de réussite aux examens, tels que le brevet et le baccalauréat, avoisine seulement 30 %, malgré des cas fréquents de tricherie. La confiance de la population dans le système éducatif est ébranlée, et beaucoup de familles préfèrent que leurs enfants travaillent pour subvenir aux besoins financiers, plutôt que de les envoyer à l’école. Étudier est perçu comme un investissement risqué, surtout si cela ne garantit pas un avenir meilleur. Par conséquent, de nombreux enfants, et particulièrement les filles, abandonnent l’école. À cela, s’ajoutent les contraintes budgétaires de l’État, qui, très endetté, peine à investir dans l’éducation. Dans les écoles publiques d’Abidjan, il n’est pas rare de voir des classes de plus de 100 élèves, avec un système de double vacation dès le cours préparatoire (100 élèves le matin et 100 autres l’après-midi), et l’absence d’infrastructures de base, comme des toilettes, aggrave la situation, surtout pour les filles.
Enseigner une matière scientifique aux Ivoiriennes
C’est dans ce contexte que le groupe scolaire Madeleine Daniélou a été fondé, avec pour mission de lutter contre la déscolarisation et de former des femmes autonomes et engagées dans les sciences, prêtes à construire le monde de demain. Mon rôle s’inscrivait dans cette ambition. D’une part, en tant que femme de science, j’enseignais la physique-chimie et l’informatique à mes élèves. Et d’autre part, je les encourageais à envisager des carrières scientifiques. J’ai mis un point d’honneur à rendre mes cours plus concrets en intégrant des travaux pratiques, pour leur transmettre le goût des sciences expérimentales, tout en leur servant de modèle. J’enseignais à huit classes, soit environ 30 élèves par classe, allant de la 6e à la terminale, en physique pour les plus jeunes et en informatique pour les élèves de seconde, première et terminale. De plus, j’ai animé un club scientifique pour éveiller encore davantage leur curiosité à travers des expériences simples et ludiques.
A LIRE AUSSI – Clémentine, en mission avant Marine, présente le groupe scolaire Madeleine Daniélou et ce que l’enseignement des sciences apporte aux filles qui y sont élèves
Leur gratitude m’a touchée profondément
Cette expérience de volontariat a été incroyablement enrichissante. C’était un rêve d’enfance de partir enseigner à l’étranger, et j’ai vécu des moments inoubliables avec mes élèves. Leur gratitude m’a touchée profondément. Elles me remerciaient souvent d’avoir « sacrifié un an de ma vie » pour leur offrir des cours gratuitement Et je leur expliquais que les voir venir en classe avec enthousiasme et sourire était la plus belle des récompenses. Certaines m’ont même confié vouloir « devenir comme moi plus tard ». Et de nombreux parents m’ont remerciée en me disant que la physique était devenue la matière préférée de leur fille. Cela, pour moi, était le plus beau des salaires. Même après mon retour, quatre mois plus tard, je garde encore contact avec certaines élèves qui continuent de me remercier et de m’encourager à revenir enseigner.
Ne pas découvrir la Côte d’Ivoire comme touriste mais d’une manière authentique
Au-delà de l’enseignement, ce volontariat a été une occasion unique de découvrir un pays et une culture d’une manière profondément authentique. En partageant simplement mon temps, j’ai vécu au rythme des habitants, côtoyé mes collègues locaux et me suis totalement intégrée à cette communauté ivoirienne d’une chaleur humaine incroyable. Découvrir un pays de l’intérieur, en adoptant pendant un an le mode de vie de ses habitants, m’a permis de grandir humainement bien plus que tout voyage touristique ne l’aurait fait.
Grandir dans sa foi
Cette expérience m’a également transformée spirituellement. Issue d’une famille catholique, j’avais été baptisée bébé. Mais ayant grandi dans un village rural où l’église était en mauvais état, l’accès à la messe était compliqué, et je ne communiais pas. En France, cette situation me faisait ressentir un certain malaise, comme si l’on me jugeait pour ne pas être une « bonne catholique ». En Côte d’Ivoire, j’ai trouvé une forme de foi beaucoup plus pure et libératrice. Avec le soutien des Sœurs, j’ai repris confiance en ma foi. Et, en avril, j’ai pu célébrer ma première Communion entourée des Sœurs, de mes collègues, et même de mes parents qui étaient venus me rendre visite. Aujourd’hui, je n’ai plus aucune honte à affirmer ma foi. Car j’ai compris que chacun a sa propre relation avec Dieu, et que personne ne peut juger la mienne. J’ai gardé des liens très forts avec la Communauté Saint-François-Xavier d’Abidjan. Et si tout se passe bien, je devrais recevoir ma confirmation au diocèse de Valence lors de la Pentecôte. Tout cela n’aurait pas été possible sans l’aide précieuse des Sœurs que je ne manque jamais de remercier, de la DCC et des diocèses qui participent au financement des missions de volontariat, et bien sûr, de Dieu. Je remercie toutes les personnes qui ont œuvré de près ou de loin pour que je puisse vivre cette aventure inoubliable.
A LIRE AUSSI – Le récit de la découverte de la communauté melkite par Inès, jusqu’à son baptême dans cette communauté
L’article Sciences et foi en Côte d’Ivoire est apparu en premier sur La DCC.