En année de césure en master de psychologie, Romane a été envoyée en mission à Douala. Dans cette ville du Cameroun, elle a pu apporter ses compétences de psychologue à la Mady Life Foundation, un centre de rééducation pour enfants handicapés. Romane nous expose la situation – ENTRETIEN 1/2
Quelle est la situation des enfants handicapés au Cameroun ?
Bien que cela commence un peu à évoluer, la sensibilisation sur le handicap au Cameroun n’est pas celle que l’on connaît en France. Les enfants handicapé sont souvent des enfants que l’on cache à la maison. Notamment par peur de ce que peut penser le voisinage. Les croyances dans les puissances maléfiques ont une place assez importante dans la culture camerounaise. Cela peut fortement porter préjudice aux enfants “différent”. Car il arrive que l’on pense que c’est un enfant sorcier, ou que l’âme de l’enfant a été vendue à une sorcière contre de l’argent ou autre. Plus largement, il y a aussi beaucoup de dénis de la part de la famille, car c’est difficile d’accepter que son enfant soit différent, qu’il ne réussira peut être pas comme les autres.
Les enfants font aussi face à une autre difficulté : le manque de matériel, le manque de formation sur le handicap, le manque de compréhension et d’infrastructure adapté. Les prise en charge proposées sont moins spécifiques et parfois la méconnaissance du handicape peut amener les adultes à être “maltraitants” envers l’enfant. Même pour les handicaps moins sévères, les enfants scolarisés font face à un grand obstacle. Dans beaucoup d’écoles, il arrive que les enfants soient 80 par classe. Même avec toute la bonne volonté du monde, comment voulez-vous que la maîtresse puisse adapter ses apprentissages à un jeune aux besoins spécifiques ?
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Comment la Mady Life Foundation vient répondre à cette problématique du handicap ?
La Mady Life a été créée par Aurélie Bandjoun et Ondoa. Aurélie a fait des études de psychologie et a voulue créer le centre afin de pouvoir aider les jeunes en situation de handicaps. On y accueille 30 enfants avec des handicaps psychomoteurs. Lors de ma mission, le plus jeune avait 3 ans et le plus vieux n’ avait que 36. La plupart de ces enfants étaient issus de famille à faible revenu, et venait donc gratuitement.
Sur place au quotidien, l’équipe est constituée d’Aurélie, en qualité de psychothérapeute, Madame Djoudj Yimou qui est l’institutrice et un jeune qui vient aider en plus. Durant la semaine, de nombreux autres professionnels peuvent intervenir. C’est le cas d’Ondoa, qui est artiste et qui propose diverses activités aux enfants. Il y a aussi un prof de sport et un prof de danse.
Afin de sensibiliser au handicap, la mady life propose un maximum de sorties extérieures aux enfants. Il arrive aussi que les jeunes du centre fassent des spectacles. Ce qui permet également d’initier les enfants à l’art.
Pourquoi La Mady Life Foundation fait-elle appel à un volontaire ?
Embaucher du personnel formé dans le handicap est très difficile à Douala. Même avec ma présente, nous n’étions que 3 à 4 adultes sur place pour 30 enfants handicapés. Alors forcément la prise en charge est moins individualisée et moins spécifique. Cependant, comme on est obligé de former les plus grands dès le départ à s’occuper des plus petits et à avoir de nombreuses responsabilités, cela participe de leur rééducation. Cela permet aussi de les valoriser auprès de leur famille et de la société.
Que font justement les enfants handicapés du centre ?
Les enfants arrivent le matin et repartent le soir. Chaque semaine, les enfants participent à de nombreuses activités telles que le sport avec un prof et de la danse. Régulièrement d’autres intervenants viennent afin de proposer d’autre atelier tels que de l’art plastique, des contes, ramassage de déchets dans la ville, couture …
En dehors du centre, les conditions environnementales ne sont pas forcément adaptées pour ces enfants. C’est assez imprévisible, tout le monde ne comprend pas leur handicap. Mais au centre, on fait tout pour qu’ils soient autonomes. Pour cela, dès que les sens sont capables, on leur confie de nombreuses tâches telles que : laver le sol, distribuer le repas auprès des autres enfants, surveiller les plus petits, aller puiser de l’eau, changer les petits, etc. On essaye aussi auprès des plus grands, de les envoyer faire des courses. Pour les entraîner à faire une demande, gérer de l’argent et faire avec les possibles imprévisibilité qu’il peuvent rencontrer. Ces compétences sont entraînées au quotidien. Cela est un pilier très important pour l’acceptation des handicapés par la famille. Car il faut montrer à la famille que leur enfant peut être utile si on veut qu’elle travaille avec nous. Pour certains, on tente même de les intégrer dans un milieu professionnel, que cela soit dans des entreprises, réaliser des tâches très simples, vendre sur le marché. Pour d’autres cela peut-être la couture, la coiffure, le ménage. Mais la perception du handicap et le manque de moyens sont un grand frein à cette intégration.
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